Formes de monuments

2008 – 2009

Dans le cadre de ma résidence à Contretype, je porte un regard sur le phénomène de la « bruxellisation », un terme utilisé par les urbanistes pour désigner le développement anarchique d’une ville abandonnée à la vision des promoteurs immobiliers. Ce phénomène fut particulièrement sensible dans les années 1960 et 1970, lorsque que la ville était livrée aux rêves de « cité du futur ». À mes yeux, cela se poursuit de nos jours, notamment avec le développement des institutions européennes. Il semble presque y avoir deux Bruxelles : celle des citoyens ordinaires qui l’habitent, puis l’autre, plus artificielle et souvent déserte, où transite une certaine élite technocratique.

Les chancres urbains, comme l’architecture brutaliste et les quartiers d’affaires que je rencontre à Bruxelles, me rappellent certains des «no man’s lands» d’Amérique qui me sont familiers. En les parcourant, j’éprouve les mêmes sentiments d’aliénation et de déracinement. Je découvre aussi Bruxelles sous une tout autre perspective: habitée et historique. Je suis alors frappée par les contrastes étonnants qui disloquent la ville. Le corpus photographique que je développe suite à ma résidence articule ces oppositions en soulignant le caractère brutal de cette cohabitation. Utilisant la statuaire sociale comme référence à une échelle plus humaine, je donne un sens nouveau à des monuments d’une autre époque. Ces espaces numériquement recomposés semblent commémorer l’arasement d’une mémoire locale. Ils évoquent aussi la tragédie humanitaire et la lutte contre l’oppression. Ainsi réhabilités dans la trame urbaine, les voici transformés en trouble-fêtes et en symboles de résistance.

8 images de formats moyens et de grands formats. Ces œuvres ont été réalisées dans le cadre d’une résidence d’artiste à L’Espace photographique Contretype (Bruxelles) en collaboration avec VOX Centre de l’image contemporaine (Montréal)