Isabelle Hayeur contre Biennale de Montréal : retour sur le jugement et quelques considérations entourant cet événement




(ENGLISH BELOW)

Le 28 septembre 2016, j’ai reçu un avis de jugement favorable de la Cour du Québec, « Division des petites créances ». En page 7 du jugement, la Biennale de Montréal était condamnée à me verser une indemnité. J’aimerais faire un retour sur les événements et sur certains détails de ce jugement. Ce dédommagement est bien inférieur à ce que je demandais au départ, mais je suis tout de même satisfaite, car être déboutée m’aurait causé un préjudice défavorable et aurait pu décourager certains artistes. Beaucoup de temps et d’énergie ont été investis dans cette cause, car elle m’a toujours semblée dépasser mon histoire personnelle. En effet, elle soulève des questions liées aux droits des artistes et aux obligations des diffuseurs.

Murs Aveugles était une commande spéciale que la Biennale de Montréal m’avait passée plusieurs mois avant l’événement. Avant d’être retirée – le soir du vernissage officiel de BNLMTL, le 22 octobre 2014 – cette œuvre in situ avait été approuvée à deux reprises par la Biennale et par le Quartier des spectacles de Montréal. Rappelons aussi qu’elle était présentée sur un site de projection permanent qui accueille des œuvres vidéo depuis des années.

Dans un texte publié sur le site du RAAV, Christian Bédard mentionne aussi que : « Le seul motif invoqué par la Biennale pour stopper brusquement la projection de l’œuvre est une allégation qui ne reposait pas sur une plainte formelle, une mise en demeure ou un avis écrit. On a ouï dire que la propriétaire du mur, d’origine chinoise, s’était plainte de la présence de flammes dans la vidéo, ce qui dans sa culture est de mauvais augure, selon elle. La Biennale, et le Quartier des spectacles, voulant sans doute préserver leur relation tacite avec la propriétaire, puisque qu’il n’y a pas de contrat entre eux pour les projections sur son mur, ont immédiatement conclu au retrait de l’œuvre de la programmation de la Biennale. »

Suite au retrait de l’œuvre, j’ai publié un premier texte qui visait surtout à informer le public que l’œuvre n’était plus présentée, puisque la Biennale ne le faisait pas. À ce moment, je ne connaissais pas encore les détails qui m’ont permis de bien comprendre ce qui était arrivé.

En juillet 2015, après plusieurs rencontres infructueuses avec la direction et le conseil d’administration de la Biennale de Montréal, j’ai déposé une poursuite contre cet organisme, avec l’aide du RAAV. J’ai alors publié un second texte qui expliquait pourquoi.



Le jugement


Le jugement rendu par la Cour du Québec est décevant, puisqu’il se range aux arguments de la Biennale voulant que « la Biennale, aux termes du contrat, n’a pas l’obligation de projeter l’œuvre, mais acquiert le droit de la présenter contre rémunération » (en page 3 du jugement). Mais pourquoi prendre la peine de signer un contrat et de verser des redevances de droits d’exposition à un artiste si ce n’est pas pour exposer son œuvre ? Une licence prévoit des dates pour l’utilisation des œuvres et l’autorisation de l’artiste doit être obtenue pour prolonger la durée de l’entente ou pour l’écourter, sinon il y a bris de contrat. Le jugement final ne semble pas porter sur les termes dudit contrat, mais plutôt sur l’interprétation que la Biennale en fait, cette dernière arguant qu’elle n’avait pas l’obligation de présenter l’œuvre. À mon avis, la façon dont la Biennale interprète son propre contrat en dit long sur la considération qu’elle a envers les artistes, l’organisation ayant, en quelque sorte, tous les droits et l’artiste devant céder ses droits sans rechigner.

À ma récente relecture du contrat signé avec la Biennale en 2014, j’ai constaté que l’organisme s’était effectivement engagé à « présenter l’Œuvre et l’Exposition dans le respect des conditions muséales généralement acceptées » (point 6.1). Ensuite, il s’engageait à « assumer les coûts raisonnables de conservation ou de restauration de l’Œuvre. Les besoins en cette matière seront d’abord établis par le restaurateur du Musée et discuté avec BNLMTL et les commissaires de l’exposition. Tout traitement de l’Œuvre devra être autorisé par l’Artiste, sauf en cas d’urgence » (point 6.5). L’œuvre Murs aveugles étant conçue pour un emplacement particulier, la déplacer ou la réparer était impossible ; il s’agissait donc d’une perte totale.

La cour a tranché que la Biennale avait agi de bonne foi et qu'elle avait été empêchée de présenter l’œuvre par la propriétaire de l'édifice sur lequel ma vidéo était projetée. Aux points 11, 12 et 13 du jugement, on peut lire que « Mme Hayeur ne peut pas réclamer une indemnité sur la base d’un droit qu’elle a cédé à la Biennale et donc qu’elle n’a plus. Ce n’est d’ailleurs pas par caprice ou arbitrairement que la Biennale n’a pas projeté l’œuvre pendant toute la période souhaitée au départ. La Biennale est empêchée de le faire par la propriétaire de la bâtisse, laquelle a retiré son autorisation et refusé même de rencontrer les personnes concernées. »

Pourtant, en novembre 2014, après que la direction de la Biennale m’ait annoncé que la propriétaire de l’édifice refusait catégoriquement de nous rencontrer, je suis entrée dans le restaurant de cette dame et j’ai eu avec elle une discussion des plus cordiales. Elle m’a simplement dit qu’elle n’était pas disponible le jour où l’on désirait la voir et qu’une modification mineure à l’œuvre l’aurait accommodée, ce que j’étais prête à faire sans problème. Cette situation était à mon avis facile à régler et on a injustement fait porter le blâme sur la propriétaire de l’édifice ; était-ce afin de maquiller une mauvaise gestion de crise ?

Contrairement à ce que la direction de la Biennale a toujours avancé, je ne pense pas qu’il se soit agi d’un cas de force majeure. J’ai déjà vu pire. J’ai participé à l’Olympiade culturelle de Vancouver 2010. Mon œuvre Fire with Fire allait être retirée si l’on n’intervenait pas, car les pompiers de la ville croyaient fermement que cette œuvre en trompe-l’œil pouvait causer des problèmes de sécurité publique. La commissaire de l’événement, Marlene Madison, a courageusement défendu mon œuvre avec beaucoup de ténacité et cela a fait toute la différence.

Dans le cas de Murs aveugles, les stratégies employées par la direction pour régler la situation me laissent encore perplexes. On songea d’abord à envoyer un communiqué pour inviter la communauté artistique à fréquenter le restaurant de Madame Chow (propriétaire de l’édifice). Puis une dame d’origine chinoise fut mandatée pour discuter avec la propriétaire et essayer d’obtenir un rendez-vous avec elle. Il y eut plusieurs échanges téléphoniques et il fallait attendre les retours d’appels pour en rediscuter à nouveau; cela a causé des délais et a embrouillé davantage la situation. Lorsqu’il fut question de simplement se présenter à son établissement pour discuter calmement, cette solution fut écartée par la direction de la Biennale. On dirait un cas de peur irrationnelle de l'autre sous couvert d'une malheureuse caricature d’« accommodement raisonnable ».

Aux points 36 et 37 de ce jugement, on peut lire l’information suivante : « Mme Hayeur aurait quand même dû s’impliquer même si l’intervention de la Biennale avait été plus importante, ne serait-ce que pour répondre aux questions des journalistes. Mme Hayeur avait d’ailleurs intérêt à le faire pour minimiser ses dommages. La réclamation doit donc être mitigée. » Ce point du jugement me laisse encore plus songeuse, puisque j’ai donné beaucoup d’entrevues dans les journaux et à la radio et que je n’en ai refusée aucune. J’ai aussi participé à une table-ronde sur la censure à l’UQAM. J’ai vraiment passé beaucoup de temps à collaborer avec la Biennale et le Quartier des spectacles, jusqu’à ce que cela se soit révélé être une impasse.

Ce qui est normalement demandé à un artiste, c’est de créer l’œuvre, de remettre le projet à temps, de fournir des images et des textes explicatifs, de se rendre disponible pour des entrevues… Le rôle d’un organisme artistique est de s'assurer que les conditions de diffusion sont adéquates, de faire une bonne médiation et d’encadrer la réception de l'œuvre. Pour un artiste, il est normal de s'attendre à ce que son diffuseur prenne les dispositions nécessaires pour que son travail soit correctement présenté au public. Dans ce jugement, on aurait pu noter que l’absence de contrat entre la propriétaire et la Biennale (et son partenaire, le Quartier des spectacles) représentait une forme de négligence de la part du diffuseur.

Un point positif dans ce jugement : il a été établi que la Biennale a failli à ses obligations et qu’elle aurait dû, d’après son contrat, prendre en charge les communications à la suite du retrait de l’œuvre, ce qu’elle n’a pas fait.

Passer en cour est une expérience intimidante en soi, puisqu’on comprend mal les rouages de l’appareil juridique et que son protocole est un peu lourd. Christian Bédard et moi-même étions bien préparés. Nous avions beaucoup d’arguments et nous comptions les présenter, mais nous n’en avons pas tellement eu la chance. Dès le départ, le juge ne semblait pas comprendre de quoi il s’agissait. Je me souviens qu’il m’a demandé: « Est-ce que la Biennale de Montréal, c’est un peu comme le Festival de Jazz ? » On peut comprendre cette réaction, car le domaine des arts visuels n’est connu que d’une faible portion de la population. Par la suite, le juge prenait des notes et il fallait détailler nos arguments très lentement, ce qui rendait la chose peu naturelle. Je n’ai pas eu le temps de présenter ma cause comme je l’aurais souhaité et Me Bédard n’a presque pas pu se prononcer. Ma cause était atypique. Celles qui sont généralement présentées devant ce tribunal relèvent davantage du droit des affaires ; elles concernent des procédures commerciales ou le droit de la consommation.



Murs aveugles


Murs aveugles était une œuvre engagée, destinée à un grand public. Elle s’inspirait du mouvement de contestation pacifique « Occupons Montréal ». Elle appelait à la solidarité tout en rappelant que ceux et celles qui se battent contre les injustices sont essentiels à une société saine. Lorsque qu’une voix dissidente ou provocante est écartée sous prétexte qu'elle ne respecte pas la sensibilité d’autrui – que les motifs invoqués soient d’origine politique ou culturelle – il est légitime de se demander si on lui réserve réellement une place. Quel espace ménage-t-on pour ces réflexions dans nos villes et dans la vie politique d’aujourd’hui ? Il me semble le voir rétrécir à vue d'œil.

Par sa facture bigarrée, ses slogans politiques et ses graffitis, cette œuvre évoquait les origines populaires de ce quartier situé à proximité du Quartier Latin et des bars punks. Murs aveugles contrastait avec ce que l’on présente généralement dans le Quartier des spectacles, un secteur branché en pleine gentrification. Ce nouveau quartier est situé en grande partie sur l'emplacement de l'ancien Red Light de Montréal. De nos jours, il est devenu un lieu générique et aseptisé qui perdu beaucoup de sa vitalité locale. Les œuvres qu’on y présente reflètent aussi cette mutation et semblent souvent conçues pour plaire à l’œil du touriste ou pour animer le quartier. Rappelons-nous que le concept du Quartier des spectacles est une initiative de l'ADISQ (Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo) et que le QdS fait partie du Global Cultural Districts Network, un regroupement dont la vision « artistique » est celle d’une culture du spectacle et de la consommation. On y discute de « programmation innovante », d'« ingrédients du succès » et du potentiel de « rayonnement sur la scène internationale ». Cette vision d'une culture mondialisée marchande standardise les lieux, comme les œuvres.

De nos jours, de plus en plus d’organismes artistiques font appel à des gens d’affaires pour siéger sur leurs conseils d’administration. On peut y voir une ouverture souhaitable d’un secteur vers un autre, mais cela peut aussi avoir des effets pernicieux. Soyons conscients qu’une assimilation idéologique est possible et qu’une dérive vers une pensée étrangère à la nôtre est à craindre. Ces changements se font souvent graduellement et nous les intégrons dans nos institutions, sans en être tout à fait conscients.

La commissaire Marie Perrault me faisait remarquer qu’à partir du moment où Murs aveugles avait été retirée, elle avait cessé d’exister en tant qu’œuvre d’art et elle était devenue un débat. Bien que cela ait ainsi soulevé des questions importantes, son contenu et ses messages sont malheureusement passés un peu inaperçus. Seule consolation, par son retrait, l’œuvre témoigne involontairement de ce qui se joue dans ce quartier et dans nos institutions publiques: une dépossession.



Isabelle Hayeur against Biennale de Montréal: a look back at the judgment and some thoughts about the case



On September 28, 2016, I received a notification of favourable judgment from the Small Claims Division of the Court of Quebec. On page 7 of the judgment, the Biennale de Montréal was condemned to pay me compensation. This compensation is much lower than what I was initially asking for, but I am satisfied nevertheless, since being turned down would have caused me harmful prejudice that might have discouraged certain artists. I would like to look back at the events and on certain particulars of this judgment. Much time and energy have been invested in this cause, as it has always seemed to me to have implications beyond my personal story. For it raises issues tied to artists’ rights and presenters’ obligations.

Murs Aveugles was a special commission the Biennale de Montréal had given me months in advance of the event. Before it was withdrawn – on the evening of BNLMTL’s official opening on October 22 2014 – this site-specific work had twice been approved by the Biennale and the Quartier des spectacles de Montréal. It should also be recalled that it was shown on a permanent projection site that has been hosting video works for years.

In a text published on the RAAV website, Christian Bédard also mentions that “the only motive invoked by the Biennale to abruptly stop the work’s screening is an allegation that was not based on a formal complaint, a formal notice or any notice in writing. From hearsay, we gather that the wall’s owner, of Chinese origin, complained about the presence of flames in the video, which is inauspicious in her culture, she maintains. The Biennale, and the Quartier des spectacles, no doubt wanting to preserve their tacit relationship with the owner, since there is no contract between them for screenings on her wall, immediately concluded that the work ought to be withdrawn from the Biennale’s programming.”

Following the work’s withdrawal, I published a first text that was chiefly aimed at informing the public that the work was no longer being presented, since the Biennale was not doing it. At that moment, I did not yet know the details that have enabled me to properly grasp what happened.

In July 2015, after several fruitless meetings with the management and board of directors of the Biennale de Montréal, I filed a lawsuit against this organization with the help of RAAV. I then published a second text explaining why.



The judgment


The judgment rendered by the Court of Quebec is disappointing, since it accepts the Biennale’s arguments to the effect that “the Biennale, under the terms of the contract, is not under the obligation to screen the work, but acquires the right to show it against a remuneration” (on page 3 of the judgment). But why bother signing a contract and royalties from exhibition fees to an artist if it isn’t to exhibit her work? A licence spells out dates for the use of the works and the artist’s authorization must be obtained to prolong the duration of the agreement or to shorten it, or else there is a breach of contract. The final judgment does not seem to have to do with the terms of said contract, but rather with the interpretation of it put forward by the Biennale, which is arguing that it did not have the obligation to show the work. In my opinion, the way the Biennale is interpreting its own contract is very telling about how it regards artists, the organization having every right as it were, while the artist is supposed to give up her rights without complaining.

Upon recently reading again the contract signed with the Biennale in 2014, I realized that this organization did make a commitment to “show the Work and the Exhibition in accordance with generally accepted museum conditions” (item 6.1). It then made a commitment to “bear the reasonable costs of the Work’s conservation or restoration. The needs in this respect will first be established by the Museum’s restorer and be discussed with BNLMTL and the exhibition’s curators. Any treatment of the Work will need to be authorised by the Artist, except in an emergency” (item 6.5). The work Murs aveugles having been designed for a specific place, moving it or repairing it was not possible, so that it was a complete loss.

The court ruled that the Biennale had acted in good faith and that it been prevented from showing the work by the owner of the building on which my video was screened. In items 11, 12 and 13 of the judgment, we can read that “Ms. Hayeur cannot claim compensation based on a right she has ceded to the Biennale and that she therefore no longer has. Besides, it is not on a whim or arbitrarily that the Biennale did not screen the work for the whole period initially wanted. The Biennale was prevented from doing it by the building’s owner, who withdrew her authorization and even refused to meet the people concerned.”

And yet, in November 2014, after the Biennale’s management gave me the news that the building’s owner categorically refused to meet us, I entered this lady’s restaurant and had a perfectly friendly talk with her. She simply told me that she was not available on the day the Biennale wanted to see her and that a minor change to the work would have allayed her concerns —something I was willing to do without a problem. In my opinion, this situation was easy to settle and the blame was unfairly put on the building’s owner; was it to disguise some dubious crisis management?

Contrary to what the Biennale management has always maintained, I don’t think this was a case of force majeure. I’ve seen worse before. I participated in the Vancouver 2010 Cultural Olympiad. My work Fire with Fire was going to be withdrawn if somebody did not intervene, as the city’s fire department was convinced that this trompe-l’œil work could raise public security issues. The event’s curator, Marlene Madison, courageously defended my work with great determination and that made the whole difference.

In the case of Murs aveugles, the strategies used by the management to settle the situation still leave me puzzled. They first thought of sending a press release inviting the art community to patronize the restaurant of Mrs. Chow (the building’s owner). Then a lady of Chinese heritage was entrusted with talking with the owner and trying to get an appointment with her. There were many phone exchanges and waiting for return calls to talk it over anew caused delays and further confused the situation. When the idea was brought up to simply show up at her establishment to discuss it calmly, this solution was dismissed by the Biennale’s management. It does look like a case of irrational fear of the Other under cover of a bad caricature of “reasonable accommodation”.

At items 36 and 37 of this judgment, we may read the following information: “Ms. Hayeur should still have gotten involved even had the Biennale’s intervention been more significant, be it only to answer journalists’ questions. Besides, it was in Ms. Hayeur’s interest in order to minimize the damage. Her claim must therefore be qualified.” This point of the judgment leaves me even more perplexed, as I gave a lot of interviews in the papers and on the radio, never turning down any request for one. I also took part in a roundtable on censorship at UQAM. I did spend a lot of time collaborating with the Biennale and the Quartier des spectacles, until this proved to be a dead end.

Among the things expected of an artist are that the work be created, that the project be handed in time, that images and explanatory texts be provided, that one should make oneself available for interviews… The role of an art organization is to ensure that the conditions of presentation are suitable, to do proper mediation and to frame the work’s reception. It is normal for an artist to expect of the presenter that the measures required for the work’s proper public display be taken. In this judgment, one misses a recognition that the absence of a contract between the owner and the Biennale (and its partner, the Quartier des spectacles) represented a form of negligence on the presenter’s part.

One positive point in this judgment is that it establishes that the Biennale failed in its obligations and that, per its contract, it should have taken charge of communications following the work’s withdrawal, which it did not do.

Appearing in court is an intimidating experience in itself, since the workings of the judicial system are not easy to grasp and its protocol is rather ponderous. Christian Bédard and I were well-prepared. We had many arguments that we were counting on presenting, but we did not have much of an opportunity to do so. From the word go, the judge appeared not to understand what this was all about. I remember him asking me: “The Biennale de Montréal, is that kind of like the Jazz Festival?” This reaction is understandable, since only a tiny fraction of the population has any familiarity with the art world. Later on, the judge was taking notes and we had to go over our arguments very slowly, which made the proceedings rather awkward. I did not have time to present my case as I would have liked and Me Bédard hardly had the opportunity to plead. My case was atypical. The ones that are usually presented before this tribunal have more to do with commercial law, involving business procedures or consumer law.

Murs aveugles was a committed work aimed at a wide audience. It was inspired by the peaceful protest movement Occupy Montreal. It appealed for solidarity while offering a reminder that people who struggle against injustices are part and parcel of a healthy society. When a dissident or provocative voice is silenced under the pretext that it doesn’t respect other people’s sensibilities —whether the reasons invoked are derived from politics or culture — it is fair to ask if any place is really being made for it. What space is there left for these reflections in our cities and in political life today? I seem to be seeing it shrink to nothing under my very eyes.



Murs aveugles


With its variegated techniques, its political slogans and its graffiti, this work evoked the popular origins of this neighbourhood located near the Latin Quarter and the punk bars. Murs aveugles stood in sharp contrast with what is usually being shown in the Quartier des spectacles, a hip area in the midst of gentrification. This new neighbourhood is largely located on the site of Montreal’s former Red Light district. Today, it has become a generic, sanitized place that has lost much of its local vitality. The works being shown there also reflect this transformation and often seem designed to appeal to a tourist’s eye or to enliven the neighbourhood. We should keep in mind that the concept of the Quartier des spectacles is an initiative of ADISQ (Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo) and that QdS is a member of Global Cultural Districts Network, a group whose “artistic” vision is that of a culture of spectacle and consumption. All they talk about there is “innovative programming”, “ingredients of success” and the potential for “wide appeal on the international stage”. This vision of a globalized commodity culture standardizes both places and artworks.

Nowadays, more and more art organizations resort to business people as members of their boards of directors. This can be seen as a desirable opening of one sector to another, but it can also have deleterious effects. Let us be aware that ideological assimilation is a possibility and that a drift into a way of thinking alien to ours is to be feared. These changes often take place gradually and we integrate them in our institutions without fully realizing it.

Curator Marie Perrault once told me that from the moment Murs aveugles was withdrawn, it had ceased to exist as an artwork and had morphed into a debate. Although important issues were thus raised, its content and messages were unfortunately somewhat lost sight of. If there is one consolation in all of this, it is that, by its withdrawal, the work involuntarily bears witness to what is at stake in this neighbourhood and in our public institutions, namely: a disenfranchisement.



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